Page:Kerigant - Les Chouans - Épisodes des guerres de l’Ouest dans les Côtes-du-Nord, 1882.djvu/169

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ramené à la réalité : des gendarmes et des fédérés envahirent la maison de mon oncle.

Voici ce qui était arrivé :

Mon père, contre son attente, surpris à Kerigant, s’était hâté de prendre la fuite, et n’avait cessé d’être relancé, à travers champs, pendant près de trois lieues, par quelques fédérés. Les gendarmes, à cheval, furent contraints de suivre des chemins impraticables. Dans cette poursuite acharnée par de jeunes hommes contre un homme alors âgé de plus de cinquante ans, il fallut toute la force physique dont mon père était doué pour échapper au danger. Toutefois, l’impatience des agresseurs l’emportant, ils tirèrent sur mon père au moment où il franchissait un talus. Cette attaque s’étant renouvelée, mon père finit par riposter et blessa, heureusement pour lui, un des assaillants, ce qui ralentit la marche des autres, lui permit de se soustraire à leur vue et d’arriver, à bout de forces, dans la cour de son beau-frère.

Cependant, le chef de la colonne étant entré chez mon oncle, toujours cloué sur son fauteuil, lui déclara qu’il venait arrêter M. de Kerigant, caché, dit-il, chez lui.

Mon oncle, on ne peut plus surpris, affirma sur l’honneur n’avoir pas vu son beau-frère ; d’ailleurs, ajouta-t-il, vous pouvez visiter la maison.