Aller au contenu

Page:Kinon - L’Âme des saisons, 1909.djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
55
L'AZUR ET LES LILAS


Décidément, il sera temps que je boutonne
Mon pardessus, le vent étant traître ce soir.
Le ciel se fronce et l’on dirait qu’il va pleuvoir.
Décidément, le paysage entier frissonne...
 
O mon cœur, ô mon cœur, qu’est-ce donc que tu as?
Pourquoi si triste, alors que ce matin encore,
Dans le ruissellement de roses de l’aurore,
Tu remplissais l’azur de tes alléluias ?
 
Il n’est rien arrivé de nouveau que je sache...
Alors, pourquoi si morne et pourquoi si meurtri ?
Pourquoi pareil au rouge-gorge dont le cri
Saigne et qui vole vers les ronces et s’y cache ?
 
Le bonheur est en fleurs parmi les jours prochains,
Et ce matin encore, une ivresse divine
Te faisait battre et tressaillir dans ma poitrine...
O mon cœur,ô mon cœur, qu’est-ce donc que tu crains ?
 
Hélas ! on ne saura jamais ce qui se passe...
On a comme besoin de sangloter un peu.
On craint la sourde nuit qui rampe, on craint le feu
Des étoiles brûlant froidement dans l’espace...


1904.