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Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/268

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manière de prononcer et la mienne. De guerre lasse, il essayait une autre méthode :

— Vous prononcez ce mot du fond de la gorge. (C’était tout à fait juste : c’était bien là ce que je faisais.) Je voudrais que vous le prononçassiez d’ici tout en bas. (Et de son index gras il me désignait la région de laquelle saurais dû tirer le son.)

Après de pénibles efforts, ayant pour résultat de me faire émettre des sons qui éveillaient en moi l’idée de tout, sauf d’un lieu de recueillement, je m’excusais :

— Je sens que vraiment je ne pourrai jamais y arriver. J’avoue que voici des années que je parle avec ma bouche. Je ne savais pas qu’un homme fût capable de parler avec son estomac. Ne croyez-vous pas qu’en ce qui me concerne il est un peu tard pour l’apprendre ?

Je finis par savoir prononcer ce mot correctement. À cet effet, j’avais passé des heures dans des coins sombres et, à la grande terreur des rares passants, m’étais exercé dans des rues silencieuses. Mon professeur fut enchanté de moi et je fus satisfait de moi-même jusqu’au jour où je mis les pieds en Allemagne. En Allemagne, je constatai que personne ne comprenait ce que je voulais dire. À cause de ce mot jamais je ne pus m’approcher d’une église. Il me fallut abandonner la prononciation correcte et revenir au prix de nouveaux efforts à mon ancienne prononciation vicieuse. Alors leur visage s’éclairait et ils me disaient, sui-