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Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/184

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ouvrier ou de Commune libre, ils cherchent toujours à conserver, coûte que coûte, ce gouvernement par procuration. Tout un peuple, toute une race tiennent encore avec acharnement à ce système.

Heureusement, le jour se fait sur ce sujet. Le gouvernement représentatif n’est pas appliqué uniquement en des pays qu’auparavant nous connaissions à peine. Il fonctionne ou a fonctionné sur la grande arène de l’Europe occidentale, dans toutes ses variétés, sous toutes les formes possibles, depuis la monarchie tempérée jusqu’à la Commune révolutionnaire ; et l’on s’aperçoit que, reçu avec de grandes espérances, partout il est devenu un simple instrument d’intrigues, d’enrichissement personnel, ou d’entraves à l’initiative populaire et au développement ultérieur. On s’aperçoit que la religion de la représentation a la même valeur que celles des supériorités naturelles et des personnages royaux. Plus que cela, on commence à comprendre que les vices du gouvernement représentatif ne dépendent pas seulement des inégalités sociales : qu’appliqué dans un milieu où tous les hommes auraient un droit égal au capital et au travail, il produirait les mêmes résultats funestes. Et on peut aisément prévoir le jour où cette institution, née, selon l’heureuse expression de J.-S. Mill, du désir de se garantir contre le bec et les griffes du roi des vautours, cédera la place à une organisation politique née des véritables besoins de l’humanité et de cette conception que la meilleure manière d’être libre, c’est de ne pas être représenté, de ne pas abandonner les choses, toutes les choses, à la Providence ou à des élus, mais de les faire soi-même.

Cette conclusion surgira aussi, nous l’espérons,