Aller au contenu

Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/252

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

attribue à la Loi et aux peines, et l’effet dégradant de ces peines sur l’humanité ? Qu’on fasse seulement l’addition de toutes les mauvaises passions réveillées chez les spectateurs par les punitions atroces qu’on infligeait dans nos rues. Qui donc a choyé et développé les instincts de cruauté dans l’homme (instincts inconnus aux animaux, l’homme étant devenu l’animal le plus cruel de la terre), si ce n’est le roi, le juge et le prêtre armés de la loi, qui faisaient arracher la chair par lambeaux, verser de la poix brûlante dans les plaies, disloquer les membres, broyer les os, scier les hommes en deux, pour maintenir leur autorité ? Que l’on calcule seulement tout le torrent de dépravation versé dans les sociétés humaines par la délation, favorisée par les juges et payée par les écus sonnants du gouvernement, sous prétexte d’aider à la découverte des crimes. Que l’on aille en prison, et que l’on étudie là ce que devient l’homme, privé de liberté, enfermé avec d’autres dépravés qui se pénètrent de toute la corruption et de tous les vices qui suintent de nos prisons actuelles ; et que l’on se souvienne seulement que plus on les réforme, plus détestables elles sont, nos pénitenciers modernes et modèles étant cent fois plus corrupteurs que les donjons du moyen-âge. Que l’on considère enfin quelle corruption, quelle dépravation de l’esprit est maintenue dans l’humanité par ces idées d’obéissance — essence de la loi, — de châtiment, d’autorité ayant le droit de punir, de juger en dehors de la conscience ; par ces fonctions de bourreaux, de geôliers, de dénonciateurs, — bref, par tout cet immense appareil de la Loi et de l’Autorité. Que l’on considère tout cela, et on sera certainement d’accord avec nous, lorsque nous di-