Aller au contenu

Page:Kropotkine — Paroles d'un Révolté.djvu/313

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui lui arrachait les arriérés des taxes. « À bas l’accapareur ! » — et ses magasins étaient forcés, ses convois de blé arrêtés, et l’émeute se déchaînait en province. — « À bas l’octroi ! » et les barrières étaient brûlées, les commis assommés, et les villes, manquant d’argent, se révoltaient à leur tour contre le pouvoir central qui leur en demandait. — « Au feu les registres d’impôts, les livres de comptes, les archives des municipalités ! » et la paperasse brûlait en juillet 1789, le pouvoir se désorganisait, les seigneurs émigraient, et la Révolution étendait toujours davantage son cercle de feu.

Tout ce qui se jouait sur la grande scène de Paris n’était qu’un reflet de ce qui se passait en province, de la Révolution qui, pendant quatre ans, gronda dans chaque ville, dans chaque hameau, et dans laquelle le peuple s’intéressa bien moins aux ennemis du pouvoir central qu’à ses ennemis les plus proches : aux exploiteurs, aux sangsues de l’endroit.




Résumons-nous. — La Révolution de 1788-1793, qui nous présente sur une grande échelle la désorganisation de l’État par la révolution populaire (éminemment économique, comme toute révolution vraiment populaire), — nous sert ainsi d’enseignement précieux.

Bien avant 1789, la France présentait déjà une situation révolutionnaire. Mais l’esprit de révolte n’avait pas encore suffisamment mûri pour que la Révolution éclatât. C’est donc sur le développement de cet esprit d’insubordination, d’audace, de haine