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Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/145

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fort intéressante que de suivre, dans le cours des âges, les différentes institutions (communautés villageoises, guildes, etc.) au moyen desquelles les masses se sont efforcées de maintenir l’unité de la tribu, en dépit des agents qui travaillaient à la détruire. D’un autre côté, les premiers rudiments de savoir qui apparurent à une époque extrêmement reculée, lorsqu’ils se confondaient avec la sorcellerie, devinrent aussi un pouvoir aux mains de l’individu qui pouvait l’employer contre la tribu. C’étaient des secrets soigneusement gardés et transmis aux seuls initiés, dans les sociétés secrètes de sorciers, de magiciens et de prêtres que nous trouvons chez tous les sauvages. En même temps les guerres et les invasions créèrent l’autorité militaire, ainsi que les castes de guerriers dont les associations ou clubs acquirent aussi de grands pouvoirs. Cependant, à aucune période de la vie de l’homme, les guerres n’ont été l’état normal de l’existence. Tandis que les guerriers s’exterminaient les uns les autres et que les prêtres célébraient ces massacres, les masses continuaient à vivre leur vie de chaque jour, et poursuivaient leur travail quotidien. Et c’est une recherche des plus attachantes que de suivre cette vie des masses ; d’étudier les moyens par lesquels elles conservèrent leur propre organisation sociale, basée sur leurs conceptions d’équité, d’entr’aide et d’appui mutuel — le droit commun, en un mot, — même sous les régimes les plus férocement théocratiques ou autocratiques.