Page:Kropotkine - La Commune, la Commune de Paris, La Brochure mensuelle, n° 180, déc. 1937.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
-22-

comme il ne cherchait pas à la conquérir par les armes ; il ne tenait pas à se renfermer dans ses murs, comme un bénédictin dans un cloître ; il ne s’inspirait pas d’un esprit étroit de clocher. S’il réclamait son indépendance, s’il voulut empêcher l’intrusion dans ses affaires de tout pouvoir central, c’est parce qu’il voyait dans cette indépendance un moyen d’élaborer tranquillement les bases de l’organisation future et d’accomplir dans son sein la révolution sociale, — une révolution qui aurait transformé complètement le régime de la production et de l’échange, en les basant sur la justice, qui aurait modifié complètement les relations humaines en les mettant sur le pied de l’égalité, et qui aurait refait la morale de notre société, en lui donnant pour base les principes de l’équité et de la solidarité.

L’indépendance communale n’était donc pour le peuple de Paris qu’un moyen, et la révolution sociale était son but.

Ce but, il eût été atteint, certainement, si la révolution du 18 mars eût pu suivre son libre cours, si le peuple de Paris n’eût pas été écharpé, sabré, mitraillé, éventré par les assassins de Versailles. Trouver une idée nette, précise, compréhensible à tout le monde et résumant en quelques mots ce qu’il y avait à faire pour accomplir la révolution, telle fut, en effet, la préoccupation du peuple de Paris dès les premiers jours de son indépendance. Mais une grande idée ne germe pas en un jour, quelque rapide que soit l’élaboration et la propagation des idées pendant les périodes révolutionnaires. Il lui faut toujours un certain temps pour se développer, pour pénétrer dans les masses et pour se traduire par des actes, et ce temps a manqué à la Commune de Paris.