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Page:Kropotkine - La Commune, la Commune de Paris, La Brochure mensuelle, n° 180, déc. 1937.djvu/31

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maintenir la religion du gouvernement à côté de la religion de la propriété et de la religion divine.

Ce préjugé, — le dernier de la série : Dieu, Propriété, Gouvernement, existe encore, et il est un danger pour la prochaine révolution. Mais on peut déjà constater qu’il s’ébranle. — « Nous ferons nous-mêmes nos affaires, sans attendre les ordres d’un gouvernement, et nous passerons par-dessus la tête de ceux qui viendront s’imposer sous forme de prêtre, de propriétaire ou de gouvernant », — disent déjà les prolétaires. Il faut donc espérer que si le parti anarchiste continue à combattre vigoureusement la religion du gouvernementalisme, et s’il ne dévie pas lui-même de sa route en se laissant entraîner dans les luttes de pouvoir, — il faut espérer, disons-nous, que dans les quelques années qui nous restent encore jusqu’à la Révolution, le préjugé gouvernemental sera suffisamment ébranlé pour ne plus être capable d’entraîner les masses prolétaires dans une fausse voie.

Il y a cependant une lacune regrettable dans les réunions populaires que nous tenons à signaler. C’est que rien, ou presque rien, n’a été fait pour les campagnes. Tout s’est borné aux villes. La campagne semble ne pas exister pour les travailleurs des villes. Même les orateurs qui parlent du caractère de la prochaine révolution évitent de mentionner les campagnes et le sol. Ils ne connaissent le paysan ni ses désirs, et ne se hasardent pas de parler en son nom. Faut-il insister longuement sur le danger qui en résulte ? — L’émancipation du prolétariat ne sera même pas possible, tant que le mouvement révolutionnaire n’embrassera pas les villages. Les Communes insurgées ne sauraient se maintenir même un an, si l’insurrection ne se propageait pas en même temps dans les