Page:Kropotkine - La Conquête du pain.djvu/281

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état de misère leurs nuits blanches amèneraient le travailleur, ils auraient probablement brûlé leurs devis, brisé leurs modèles.

Un autre principe, qui pénètre aussi l’économie politique, est tout aussi faux. C’est l’admission tacite, commune à presque tous les économistes, que, s’il y a souvent surproduction dans certaines branches, une société n’aura néanmoins jamais assez de produits pour satisfaire aux besoins de tous ; et que, par conséquent, il n’arrivera jamais un moment où personne ne sera obligé de vendre sa force de travail en échange d’un salaire. Cette admission tacite se retrouve à la base de toutes les théories, de toutes les prétendues « lois » enseignées par les économistes.

Et cependant, il est certain que du jour où une agglomération civilisée quelconque se demanderait quels sont les besoins de tous et les moyens d’y satisfaire, elle s’apercevrait qu’elle possède déjà, dans l’industrie comme dans l’agriculture, de quoi pourvoir largement à tous les besoins, à la condition de savoir appliquer ces moyens à la satisfaction de besoins réels.


Que cela soit vrai pour l’industrie, nul ne le peut contester. Il suffit, en effet, d’étudier dans les grands établissements industriels les procédés déjà en vigueur pour extraire le charbon et les minerais, obtenir l’acier et le façonner, fabriquer ce qui sert au vêtement etc., pour s’apercevoir qu’en ce qui concerne les produits de nos manufactures, nos usines, nos mines, nul doute n’est possible à ce sujet. Nous pourrions déjà quadrupler notre production, et encore économiser sur notre travail.