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LA GRANDE RÉVOLUTION

allait recueillir le pouvoir tombant des mains de la royauté ; et elle savait ce qu’elle voulait en faire.

Son idéal était de donner à la France une constitution, modelée sur la constitution anglaise. Réduire le roi au rôle de simple scribe enregistreur, — pouvoir pondérateur quelquefois, mais chargé surtout de représenter symboliquement l’unité nationale. Quant au pouvoir réel, élu, il devait être remis aux mains d’un parlement, dans lequel la bourgeoisie instruite, représentant la partie active et pensante de la nation, dominerait le reste.

En même temps, son idéal était d’abolir tous les pouvoirs locaux ou partiels, qui constituaient autant d’unités autonomes dans l’État, de concentrer toute la puissance gouvernementale entre les mains d’un pouvoir exécutif central, strictement surveillé par le parlement, — strictement obéi dans l’État, et englobant tout : impôt, tribunaux, police, force militaire, écoles, surveillance policière, direction générale du commerce et de l’industrie — tout ! proclamer d’ailleurs la liberté complète des transactions commerciales, et en même temps donner carte blanche aux entreprises d’industrie pour l’exploitation des richesses naturelles, ainsi que des travailleurs, livrés désormais sans défense à celui qui voudrait leur donner du travail.

Et tout cela devait être placé sous le contrôle de l’État qui favoriserait l’enrichissement des particuliers et l’accumulation des grandes fortunes — conditions auxquelles la bourgeoisie d’alors attribuait nécessairement une grande importance, puisque la convocation même des États-Généraux avait eu lieu pour parer à la ruine financière de l’État.