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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/442

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le procès du roi allait se transformer en un procès des Montagnards. Mais rien n’y aida. La logique de la situation l’emporta sur les chicanes de la tactique parlementaire.

On prétexta d’abord l’inviolabilité du roi, établie par la Constitution ; à quoi il fut répondu victorieusement que cette inviolabilité n’existait plus, dès que le roi trahissait et la Constitution et sa patrie.

On demandait ensuite un tribunal spécial, formé de représentants des 83 départements ; et lorsqu’il devint évident que cette proposition serait écartée, les Girondins voulurent que le jugement fût soumis à la ratification des 36.000 communes et des assemblées primaires, par appel nominal de chaque citoyen. C’était remettre en question les résultats du 10 août et la République.

Lorsque l’impossibilité de se décharger ainsi du procès sur les épaules des assemblées primaires fut démontrée, alors les Girondins, qui avaient eux-mêmes furieusement poussé à la guerre et recommandé la guerre à outrance contre toute l’Europe, se mirent à invoquer l’effet que produirait sur l’Europe l’exécution de Louis XVI. Comme si l’Angleterre, la Prusse, l’Autriche, la Sardaigne avaient attendu la mort de Louis XVI pour faire leur coalition de 1792 ! Comme si la République démocratique ne leur était pas suffisamment odieuse ; comme si l’appât des grands ports commerciaux de la France, de ses colonies et de ses provinces de l’Est ne suffisait pas pour coaliser les rois contre la France, afin de profiter du moment où l’enfantement d’une société nouvelle pouvait amoindrir sa force de résistance extérieure !