Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/542

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quelques bourgeois du village, qui s’enrichissent par un petit commerce quelconque et espèrent s’approprier les lopins des pauvres, une fois que les terres communales seront partagées. Quant à la masse, au gros des paysans, elle est généralement opposée au partage.

Le même fait se produisit en France pendant la Révolution. À côté de la masse, plongée dans une misère affreuse, toujours croissante, il y avait aussi, comme nous l’avons dit, le paysan-bourgeois, qui s’enrichissait d’une façon ou d’une autre, et dont les réclamations arrivaient surtout aux oreilles de l’administration révolutionnaire, bourgeoise par son origine, par ses goûts et certaines façons d’envisager les choses.

Ces bourgeois-paysans étaient parfaitement d’accord avec la masse des paysans pauvres pour demander le retour aux communes des terres communales enlevées depuis 1669 par les seigneurs ; mais ils étaient contre cette masse, lorsqu’ils demandaient le partage définitif des terres communales.

Ils l’étaient d’autant plus que dans toutes les communes, villageoises aussi bien qu’urbaines, une distinction s’était établie au cours des siècles entre deux classes d’habitants. Il y avait les familles plus ou moins aisées, qui étaient, ou se disaient descendues des premiers fondateurs de la commune. Ceux-ci s’appelaient « les bourgeois », die Bürger en Alsace, « les citoyens », ou bien « les familles ». Et il y avait ceux qui étaient venus plus tard s’établir dans la commune et qui s’appelaient « les habitants », « les manants », die Ansässigen en Alsace et en Suisse.

Les premiers seuls avaient droit aux terres commu-