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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/66

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le droit de mouture fût réduit de moitié, et ce fut aussitôt accordé[1].

Cette insurrection, c’est l’image de cent autres. Le pain était le motif premier du mouvement. Mais bientôt, il s’y joignait des réclamations dans le domaine où les conditions économiques et l’organisation politique se touchent, — le domaine dans lequel le mouvement populaire procède toujours avec le plus d’assurance et obtient des résultats immédiats.

En Provence, toujours en mars et en avril 1789, plus de quarante bourgades et villes, dont Aix, Marseille et Toulon, abolirent l’impôt sur la farine, et un peu partout la foule saccagea les maisons des fonctionnaires préposés à lever les impôts sur la farine, les cuirs, les boucheries, etc. Les prix des vivres furent réduits et tous les vivres furent taxés ; et quand les messieurs de la haute bourgeoisie protestèrent, la foule se mit à les lapider ; ou bien on creusa sous leurs yeux la fosse qui servirait à les enterrer — quelquefois on apporta même d’avance le cercueil pour mieux impressionner les réfractaires, qui s’empressaient évidemment de céder. Tout se passa alors (avril 1789) sans la moindre effusion de sang. C’est « une espèce de guerre déclarée aux propriétaires et aux propriétés », disent les rapports des intendants et des municipaux ; « le peuple continue de déclarer qu’il ne veut rien payer, ni impôts, ni droits, ni dettes. »[2]

Dès lors, c’est-à-dire dès avril, les paysans commen-

  1. Taine, II, 22, 23.
  2. Lettres dans les Archives Nationales, H, 1453, citées par Taine, t. II, p. 24.