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LXIV

LUTTE CONTRE LES HÉBERTISTES


Déjà au mois de décembre 1793, Robespierre parlait de la fin prochaine de la République révolutionnaire. « Veillons, disait-il, car la mort de la patrie n’est pas éloignée[1]. » Et il n’était pas seul à la prévoir. La même idée revenait de plus en plus souvent dans le discours des révolutionnaires.

C’est qu’une révolution qui s’arrête à mi-chemin marche nécessairement à sa perte. Et la situation en France était telle, à la fin de 1793, qu’ayant été arrêtée au moment où elle cherchait une vie nouvelle dans la voie des grands changements sociaux, la Révolution s’abîmait maintenant dans des luttes intérieures et dans un effort, aussi infructueux qu’impolitique, d’exterminer ses ennemis, — tout en montant la garde autour de leurs propriétés[2].

  1. Jacobins, séance du 12 décembre 1793, t, V, p. 557.
  2. Michelet l’avait bien compris lorsqu’il écrivit ces lignes pleines de tristesse (livre XIV ch. 1), où, rappelant la parole de Duport : Labourez profond, il disait que la Révolution devait s’abîmer parce que les Girondins et les Jacobins « furent également les logiciens politiques » qui ne marquaient que « des degrés sur une ligne unique ». Le plus avancé, Saint-Just, ajoutait-il, « n’ose toucher ni la religion, ni l’éducation, ni le fond même des doctrines sociales : on entrevoit à peine ce qu’il pense de la propriété. » Il manquait ainsi la Révolution, pour l’assurer, dit Michelet, « la révolution religieuse, la révolution sociale, où elle eût trouvé son soutien, sa force, sa profondeur. »