Aller au contenu

Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/705

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ainsi se poursuivait la lutte sanglante entre les diverses fractions du parti révolutionnaire ; et l’on comprend jusqu’à quel point l’invasion et toutes les horreurs de la guerre civile durent envenimer ces luttes. Certaines questions, cependant, viennent se poser : Qu’est-ce qui empêcha la lutte des partis de prendre un caractère acharné dès le début de la Révolution ? Qu’est-ce qui permit à des hommes, dont les vues politiques étaient aussi différentes que celles des Girondins, de Danton, de Robespierre ou de Marat, de s’entendre pour une action commune contre le despotisme royal ?

Il est fort probable que les rapports d’intimité et de fraternité qui s’étaient établis, aux approches de la Révolution, à Paris et en province, entre les hommes marquants de l’époque, dans les loges maçonniques, contribuèrent à faciliter cette entente. On sait, en effet, par Louis Blanc, Henri Martin, et par l’excellente monographie du professeur Ernest Nys[1], que presque tous les révolutionnaires de renom ont appartenu à la franc-maçonnerie. Mirabeau, Bailly, Danton, Robespierre, Marat, Condorcet, Brissot, Lalande, etc., en étaient, et le duc d’Orléans (Philippe-Égalité) en resta le grand maître national jusqu’au 13 mai 1793. D’autre part, on sait aussi que Robespierre, Mirabeau, Lavoisier et probablement beaucoup d’autres appartenaient aux loges d’Illuminés, fondées par Weishaupt, et dont le but était de « délivrer les peuples de la tyrannie des princes et des prêtres, et, comme progrès immédiat, de

  1. Ernest Nys, Idées modernes. Droit International et Franc-Maçonnerie. Bruxelles, 1908.