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sur le peuple », dit carrément Arthur Young. La menace du roi devenait ainsi vide de sens. L’attitude du peuple était trop menaçante, pour que la Cour essayât de recourir aux baïonnettes, et c’est alors que Louis XVI lança cette exclamation : « Après tout, f…, qu’il y restent ! »

Mais quoi, l’assemblée même du Tiers ne délibérait-elle pas sous les yeux et les menaces du peuple qui occupait les galeries ? Déjà le 17 juin, lorsque le Tiers-État se constitua en Assemblée Nationale, cette décision mémorable fut prise aux acclamations des galeries et des deux ou trois mille personnes qui entouraient la salle des séances. La liste des trois cents députés du Tiers qui s’y étaient opposés et s’étaient rangés autour de l’ultra-royaliste Malouet, courut Paris, et il fut même question de brûler leurs maisons. Et lorsque, lors du serment du Jeu de Paume, Martin Dauch s’y opposa, Bailly, le président de l’Assemblée, eut la prudence de le faire échapper par une porte détournée, pour lui éviter d’affronter le peuple réuni aux portes de la salle ; pendant quelques jours il dut se cacher.

Sans cette pression du peuple sur l’Assemblée, il est fort probable que jamais les députés courageux du Tiers, dont l’histoire a gardé le souvenir, ne seraient venus à bout des résistances des timides.

Quant au peuple de Paris, il se préparait ouvertement à l’émeute par laquelle il répondit au coup d’État militaire, que la Cour préparait contre Paris, pour le 16  juillet.