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avec des eaux-vannes, ou même avec de l'eau pure. En Angleterre, les fermiers se contentent de 4 à 5 tonnes de foin par hectare, et dans la partie de la Flandre dont il est question 6 tonnes de foin par hectare sont considérées comme une bonne récolte. Mais dans les prairies irriguées des Vosges, de Vaucluse, etc., quinze tonnes de foin sont devenues la règle, même dans un sol ingrat, et ce chiffre représente trois fois plus que la nourriture annuelle d'une vache laitière, qu'on peut estimer à cinq tonnes. Tout compté, les résultats de l'irrigation ont été si satisfaisants en France que de 1862 à 1882 on n'a pas irrigué moins de 550.000 hectares de prairies,[1] ce qui signifie que la ration de viande annuelle d'au moins 1.500.000 personnes a été ainsi ajoutée aux revenus du pays. En fait, dans la vallée de la Seine, la valeur des terres a été doublée par l'irrigation ; dans la vallée de la Saône, elle a quintuplé, et elle a décuplé dans certaines landes bretonnes[2].

  1. Barral, Journal d'agriculture pratique, 2 février 1889 ; Boitel, Herbages et Prairies naturelles, Paris, 1887.
  2. L'augmentation des moissons due à l'irrigation est des plus instructives. Dans la Sologne, terre improductive entre toutes, l'irrigation a fait passer la récolte de foin de 2 tonnes par hectare à 8 tonnes ; dans la Vendée, — de 4 tonnes de mauvais foin à 10 tonnes d'excellent foin. Dans l'Ain, M. Puris, ayant dépensé 19.000 fr. pour irriguer 92 hectares et demi (environ 200 fr. par hectare), obtint une augmentation de 207 tonnes d'excellent foin. Dans le sud de la France, on obtient facilement par l'irrigation une augmentation nette de près de 4 hectolitres de blé par hectare. Pour la culture maraîchère, on a obtenu une plus-value de 750 à 1.000 fr. par hectare. (Voir H. Sagnier, « Irrigation », dans le Dictionnaire d'Agriculture de Barral, t. III, p. 339).