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Page:Léo Taxil - Les trois cocus.pdf/225

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LES TROIS COCUS

Groussofski se rend auprès du disciple d’Hippocrate et lui tient ce langage :

— Monsieur le docteur, je suis malade sans l’être. Je suis venu à Lourdes pour accompagner un pèlerinage. Je n’ai pas fait le trajet de Paris au sanctuaire afin de me guérir, vu qu’en temps ordinaire je suis très bien portant. Mais, cela tient-il à la fatigue du voyage, au changement de climat, à l’influence de la température ? Je l’ignore. Toujours est-il que je souffre horriblement de la tête. Tenez, je n’ai pas pu fermer l’œil depuis quatre nuits. Une simple migraine ne vaut pas la peine de demander un miracle à la Vierge ; aussi, je me contente, pour cette vétille, de recourir à la science des hommes.

Comme on le voit, l’abbé avait accompli des progrès demis qu’il s’était installé le confesseur et en même temps l’élève des demoiselles Duverpin ; il ne commettait plus de cuirs et s’exprimait même avec une certaine facilité. Le docteur répondit ;

— Monsieur l’abbé, voire migraine m’a l’air d’être une bonne et solide névralgie, et vous avez raison d’être venu me rendre cette visite.

— Il me faudrait, insinua l’autre, quelque drogue de nature à me faire dormir cette nuit comme un sac de plomb.

— Je vois ce que c’est. Vous devez, être enclin à la colère ?

— Oui, je n’aime pas qu’on me taquine.

— Vous dînez copieusement ?

— Dame !…

— Vous buvez de même ?

— Evidemment.

— Avez-vous jamais eu la fièvre typhoïde ?

— Jamais.

— Très bien, vous pouvez l’avoir. La fièvre typhoïde est toujours précédée d’une violente migraine.

— Merci, je n’en veux pas.

— Éprouvez-vous des lancements dans la région du cerveau ?

— Des lancements ?

— Oui, des petites douleurs vives, arrivant comme par lancées, comme si vous receviez des coups d’aiguille ?

— Parfaitement, parfaitement.

— C’est à ravir. Vous avez une céphalalgie lancinante. Je vais vous rédiger une ordonnance.

— Rédigez tout ce que vous voudrez, monsieur le docteur ; mais, avant tout, n’oubliez pas de me donner une drogue