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LES TROIS COCUS

Pie IX ! murmurait-elle sans quitter son étal d’alanguissement.

— Voilà bien ce que Groussofski m’a dit, pensait le vicaire ; elle m’accepte bien pour Pie IX ; elle est en extase…

Dans la chambre numéro 84, une scène analogue se passait, ayant pour acteurs l’abbé Huluberlu et Scholastique.

Groussofski, lui, tandis que ses collègues étaient montés à son étage, s’était rendu à celui des Maçonnes ; mais, au lieu de pénétrer chez elles avec mystère, il frappa à la porte ; on lui ouvrit sans difficulté. Les demoiselles du pèlerinage à la Rastaquouère n’étaient pas de nature farouche.

Inutile d’ajouter qu’il fut reçu avec des transports de joie.

Ce cher Groussofski !… On n’avait fait que l’apercevoir à peine pendant tout le voyage.

— Plaignez-moi, dit-il. Avez-vous vu les atroces guenons à qui est rivée mon existence ?

— Et comment as-tu pu, loulou chéri, le débarrasser en ce moment de ces crampons ?

— Oh ! c’est toute une histoire.

— Raconte-la nous.

— Je le veux bien, mais à une condition.

— Laquelle ?

— C’est que vous vous abstiendrez de déranger ma petite combinaison.

— Nous le jurons !

Elles étaient cinq qui prêtèrent ce serment. Deux avaient ouvert à Groussofski, trois autres étaient accourues des chambres voisines ; le reste du pèlerinage avait sans doute des occupations absorbantes et n’avait pu venir fêter le cher « neveu ».

Alors Groussofski expliqua qu’il avait « monté une fumisterie phénoménale » à ses deux collègues en soutane, et que, dans l’instant précis où il parlait, il y avait des apparitions de feu Pie IX à l’étage au-dessus.

Les Maçonnes s’amusèrent beaucoup à ce récit, félicitèrent l’abbé de son ingéniosité transcendante, et lui donnèrent de sérieux témoignages d’amitié en récompense de ses mérites.

On se promit bien de demander le lendemain matin à Romuald et au curé Huluberlu leurs impressions sur l’aventure dans laquelle ils jouaient un rôle actif de revenant affectueux.

Quand l’aube parut, chacun avait regagné sa chambre respective. Les deux prêtres de Saint-Germain-l’Empalé se félicitaient, chacun dans son for intérieur, de leur équipée nocturne.