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Page:Léo Taxil - Les trois cocus.pdf/66

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LES TROIS COCUS


CHAPITRE VIII

L’AMOUR EN PARTIE TRIPLE.


Bienheureux sur cette terre le veinard qui n’a aucun cheveu dans son existence !

Robert Laripette avait beau être le plus jovial des bons vivants, le plus gai des joyeux drilles, il avait son cheveu. Ce cheveu s’appelait sir Ship Chandler de la False-Bay.

Drôle de particulier que ce particulier-là.

Il était Anglais et plusieurs fois millionnaire. Il possédait au Cap une mine de diamants.

Le père de Robert Laripette avait été un de ses intimes amis. Les mauvaises langues du Cap prétendaient qu’il y avait un mystère dans les relations entre M. Laripette père et sir Ship Chandler de la False-Bay. Le fait est, qu’à un moment donné, ils avaient exploité ensemble la mine de diamants dont l’Anglais était resté définitivement propriétaire.

Sir Ship Chandler était un long bonhomme qui n’en finissait plus, tellement il était grand. Quand il avait la migraine, il était obligé de rester une heure dans son bain de pieds, pour donner au sang le temps de descendre de la tête aux orteils.

Cet interminable personnage avait une fille qui était bien la créature la plus parfaite que l’on pût rêver. Jolie au possible, spirituelle en diable et bonne comme le pain, elle n’avait qu’un défaut : celui de s’appeler Briséis. Son père, admirateur fanatique du vieil Homère, lui avait infligé ce prénom-là.

En quoi, allez-vous me demander, sir Ship Chandler était-il un cheveu dans l’existence de Robert Laripette ?

En ce que notre Anglais s’était mis dans la tête de marier sa fille au jeune docteur.

Oh ! Robert la trouvait charmante, adorable. Mais, d’abord, il ne voulait à aucun prix se laisser imposer une femme ; et, ensuite, il avait en si profonde exécration l’Iliade et les autres poèmes grecs qui vous rendent fou lorsqu’on est au