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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/223

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LA SPHÉRICITÉ DES PERSONIMAGES.

d’évocation : de même que c’est la conjecture, non le spectacle, qui fait l’immensité sans bornes du ciel étoilé.

Il est une forme d’oubli spéciale, qu’il serait impossible de déceler sans notre distinction préalable entre la mémoire personnelle et la mémoire héréditaire : c’est celle qui tient à l’interférence de deux rayons ou émanations semblables de ces deux mémoires. Je m’explique : violemment éprouvée par un de nos ascendants directs, une émotion a son siège, sa place, son segment dans la mémoire héréditaire, avec l’aptitude verbale correspondante. Le rythme rotatif de la mémoire héréditaire ramène périodiquement en nous cette émotion et cette aptitude verbale, de telle sorte qu’elle pourra coïncider avec une émotion du même ordre et de même qualité, sinon de même intensité, provoquée en nous par le spectacle de la vie. Si le soi (qui joue le rôle de soleil intérieur) est actif et vigilant, ces deux émotions se surajouteront et donneront un cri, un mot, ou un écrit d’une grande profondeur. Dans le cas contraire, elles s’interféreront, et le résultat sera l’oubli presqu’immédiat. Cela s’observe notamment dans les cas où l’attention fixe et tendue, bien loin de réveiller un fait de mémoire, semble épaissir autour de soi les ténèbres. Car l’attention est la volonté de la mémoire, et l’application de cette volonté défaillante fait fuir le souvenir qu’on recherche.

Le repos est l’omission de gestes ; la parésie est l’oubli d’un geste ou d’un groupe de gestes et des