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Page:Léon Daudet – Le Monde des images.djvu/32

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vatif à cette inquiétude dans Virgile et la plainte magnifique

… Barbarus has segetes…,
car la vertu roborative de la langue latine s’accompagne ici d’une mystérieuse douceur, comparable à l’imminence d’un grand secret, dont la révélation va tout sauver : « Eh bien, me dit Maurras, dans ces âpres occasions, je préfère, à Virgile, Lucrèce ou Dante.

— Comment cela ?

— En raison même de leur rigueur. Ils nous font toucher le fond de l’inespérance et, par là même, nous obligent à rebondir. »

Ce sont deux aspects différents d’une même vérité, qui est que l’image haute, versée par les poètes dans la coupe sacrée, peut et sait guérir l’image présente de l’invasion, de la servitude, de l’exil, de la mort même. C’est là le sens profond de ce mot « les humanités », c’est-à-dire le répertoire de ce que l’homme a déjà discerné, reconnu, retrouvé ou surmonté, et le refuge suprême, aux heures où l’angoisse et le doute assiègent la raison chancelante. Je vous recommande ce critérium. Essayez d’ouvrir, dans une heure douloureuse, dans une heure où l’âme demande secours, un Cervantès, un Rabelais, un Voltaire. C’est le néant. Prenez un Corneille ou un Pascal, vous sentirez la différence. Pour être franc, ni Bossuet, ni Sénèque, cependant recommandés, le second surtout, comme