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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/106

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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

qu’il a annoncé, ou ne s’est pas réalisé, ou s’est réalisé au rebours. J’en ai donné ailleurs maints exemples. Cet historien d’Israël n’eut rien d’un prophète. Nous le retrouverons à la philosophie.

Revenant à la littérature pure, nous devons remarquer la méconnaissance, par le siècle, du très bon écrivain d’analyse que fut Stendhal (malheureusement embringué de théories matérialistes et sommaires, à la Condillac et à la Helvétius) et la demi-méconnaissance de Balzac. Le goût de l’appauvrissement littéraire commence avec la vogue de Paul-Louis Courier, à un pôle, et à l’autre, avec la diffusion des fades et illusoires romans de Mme Sand. Il se continue avec les foudroyants succès d’Alexandre Dumas père et d’Eugène Sue. Abstraction faite du feuilletonisme, qui introduit la manie de la péripétie continuelle (la suite au prochain numéro), l’immense confusion du goût public commence, qui n’est que le suintement, en littérature et en art, du suffrage universel victorieux. Le frelaté prend le pas sur le naturel, et le déclamatoire sur le sincère. En dépit du charme paysagiste de ses compositions champêtres, Mme Sand est le type de l’écrivain déclamatoire, qui veut, avant tout, montrer son grand cœur et dissimuler comme Hugo, d’autre façon, sous de belles périodes, un tempérament de feu. Elle fut une erreur de la nature, qui lui avait donné la violence du mâle dans un organisme féminin ; et elle transposa cette erreur en aspirations vagues, en abondante copie. Elle a son couvert mis au grand festin de l’hypocrisie roman-