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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/127

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L’ABERRATION ROMANTIQUE

si beaux et décisifs travaux. Il s’est produit, au XIXe siècle, une reviviscence de la littérature d’oc (et en provençal et en français) qui, à notre avis, dépasse la littérature d’oïl, proprement dite, à la même époque. J’ai déjà exposé comment, selon nous, Alphonse Daudet appartient au cycle félibréen, ainsi d’ailleurs que Paul Arène, le Nerval du Midi, dont il a la grâce et la perfection, non le mystère, ni l’écheveau.

Ensuite il existe d’excellentes traductions (de la main de ces poètes eux-mêmes) de Mistral, d’Aubanel et de Roumanille, pour ne citer que ces trois maîtres. Il est donc au moins aussi facile de les lire et de les étudier que Gœthe, par exemple, ou que Shakespeare, quand on ne sait ni l’allemand, ni l’anglais. Outre que le provençal n’est pas si éloigné du français, ni du latin qu’on ne le devine à peu près, à travers l’ensoleillement des finales. Le romanisme est plus proche de nous, et de notre compréhension, que de celle des Germains par exemple, qui ont pourtant consacré, à Mistral et au félibrige, plusieurs chaires de leurs universités. Disons simplement que la mise sous le boisseau d’une telle richesse nationale est une absurdité. C’est un scandale ineffaçable, pour l’Académie française, que de n’avoir pas offert un fauteuil à Mistral. Il ne pouvait le solliciter, mais il l’eût accepté, si on le lui eût offert. L’Académie a préféré Aicard, prosateur inexistant, poète nul, risée de toute la littérature provençale et de tous les gens de goût.

Ce qui montre bien la mauvaise foi et la sottise