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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/200

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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

paysannes ont jusqu’à présent résisté victorieusement à la propagande homicide par la presse, l’exemple et les contacts, des Grands Stupides du XIXe (notamment de Hugo, de Renan, de Zola et de leurs disciples et émules). Alors que la bourgeoisie haute, moyenne et menue, a été fortement contaminée ; alors qu’une forte partie de l’ancienne aristocratie était préservée ; alors que le monde ouvrier était sérieusement atteint. Le mot forgé par Thackeray, dans un livre d’ailleurs médiocre, le snobisme, c’est-à-dire l’engouement vaniteux, plane sur tout le tableau, littéraire et politique, des ravages du roussisme (ou rousseauisme) et du romantisme. L’aristocratie vraie et la paysannerie ignorent le snobisme ou, quand elles le rencontrent, s’amusent royalement de lui. Un des meilleurs et des plus fins critiques des progrès prétendus de la science, de la littérature, de la politique, que j’aie fréquentés, était le comte Eugène de Lur Saluces, dont on trouvera quelques fermes propos, dignes du XVIIe siècle, dans l’Enquête sur la Monarchie de Maurras, ce bréviaire du salut français. Originalité de vues, justesse, hardiesse, suprême bon sens, voilà ce qui brillait dans ce seigneur intrépide et courtois, inaccessible aux fariboles, blagues, farces, iniquités, insanités répandues chaque matin, à des millions d’exemplaires, par les feuilles à grand tirage, et cela depuis soixante-dix ans. Il examinait les choses par lui-même ; il avait tout lu, lisait tout, s’intéressait à tout ; et son avis, toujours pertinent, avait le tranchant et la précision d’un bel