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Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/296

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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

« ah », et dont les baguettes retombent, dans un temps donné, sur le nez des spectateurs. Encore une fois, ne voyez dans cette image rien de péjoratif. L’absurde, c’est de vouloir que la science soit autre chose que ce qu’elle est, qu’elle soit une métaphysique, une mystique, une religion. L’absurde, c’est d’exiger d’elle un absolu, un immuable, même une continuité. Brunetière, et tous ceux qui, avec lui, proclament faillite ce qui est remplacement, sont des niais, ou, si vous préférez une expression plus polie, des serins. Même fausses, les doctrines scientifiques d’une certaine ampleur ont leur esthétique ; elles peuvent faire bien dans les musées. L’Évolution fera plus tard l’effet d’un album d’images d’Épinal à l’usage des gosses de quarante-cinq ans, entre 1860 et 1910 ; on pourra gaiement feuilleter l’album. La fatalité héréditaire, elle, demeurera quelque chose de laid et d’informe, îlot de bouquins inutiles, au milieu d’une mare de sang et d’ennui. Mais le Pastorianisme aura sans doute laissé le souvenir d’une amusante panacée… Toutes ces petites bêtes, ou prétendues telles, ces spirilles, ces cocci, ces bâtonnets, ces jus, ces sauces, ces sérums, dont on discutera pour savoir si vraiment ils guérissaient en 1900, formeront un ensemble pittoresque, dont se divertiront, ou sur lequel s’attendriront (selon les humeurs), nos arrière-neveux. Le monsieur qui a du temps à perdre (type éternel, Dieu merci) tombant, dans une bibliothèque publique ou privée, sur l’Avenir de la Science et le lisant, s’il a l’esprit bien tourné, ne s’ennuiera certes pas.