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Page:L’amour saphique à travers les âges et les êtres, 1906.djvu/219

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LES LESBIENNES SENTIMENTALES

Il advint que, durant un exercice de chars antiques, elle fut blessée grièvement. La seule personne qui vint la voir à l’hôpital, la secourut, s’occupa d’elle, fut une femme, une écuyère de haute école fort belle, à qui elle avait fait pitié.

Remise, rentrée à l’hippodrome, Eugénie B… voua une affection exaltée à sa protectrice qui lui apparaissait plus belle, plus troublante, plus imposante qu’une reine. Celle-ci s’amusa à ce rôle de souveraine ; puis, lesbienne, exigea des preuves de l’amour d’Eugénie que celle-ci accorda, docile, mais sans éprouver autre chose qu’une passion sentimentale envers l’écuyère.

Celle-ci se lassa promptement de son amante au cœur brûlant et à la chair froide. Elle la congédia avec quelque dureté, et cependant en prenant soin par de bons conseils de faciliter la vie de la pauvre petite. Pour suivre ses avis, Eugénie apprit à retoucher des photographies et à faire cette broderie de paillettes sur tulle, que l’on nomme de la broderie de Lunéville. Ces aptitudes lui assuraient le pain. Mais c’était au prix d’un travail assidu et très fatigant. Le chagrin de la séparation avec l’écuyère aidant, Eugénie tomba malade, et ensuite, sans ressources, incapable de se remettre à l’ouvrage, il lui fallut encore recourir pour vivre à l’amour