Page:La Boétie - Discours de la servitude volontaire.djvu/134

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de notre religion ; et bref, il n’y a heure du jour où il n’y ait quelque chose qui renouvelle la mémoire du différend, même que, de malheur, en toutes les deux parts les passionnés (qui sont le plus grand nombre) sont abreuvés de cette pernicieuse opinion que leur cause est si bonne et si religieuse que pour l’avancer il n’y a point de mauvais moyen. D’où nous avons vu sortir ces meurtres cruels et cette rage populaire de ceux de Cahors(¹), et, de l’autre, ces prises ordinaires, pilleries et brûlements de temples, meurtres, saccagements, et une infinité de forces publiques. Mais pour ce qu’on ne se voit jamais si bien comme on voit autrui, regardons les exemples des autres nations, quant à ce qui leur est advenu de la permission de diverses religions.

L’empereur Charles V fut contraire de le permettre en Allemagne ; et l’on n’a vu autre chose sortir de cela que guerres et infinies calamités par toute l’Allemagne. De sorte que c’est pitié de voir cet État-là, au prix ou bien de celui d’Espagne et d’Italie, où on n’a rien souffert, ou bien encore de l’Angleterre, où toute la religion a été changée tout à coup. Je laisse à part qu’il n’y a nulle réformation de vie, comme leurs réformateurs mêmes se plaignent, mais je ne parle maintenant que des séditions.