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Page:La Chanson de la croisade contre les Albigeois, 1875, tome 2.djvu/542

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croisade contre les albigeois.

que banquettes, poutres et lices sont brisées. Mais le fils de la Vierge les protége, car dans la ville même peu furent atteints.

Le comte de Montfort manda ses chevaliers les plus vaillants du siége et les mieux éprouvés ; [8200] et fit de bons abris avec des fronts garnis de claies, et y mit des compagnies et des chevaliers armés, bien couverts de leurs armes, les heaumes lacés ; et ils amènent la chatte sans fracas et vite. Et ceux de la ville sont habiles : [8205] ils tendent et ajustent les trébuchets, et mettent dans la fronde de belles pierres taillées ; ils lâchent les cordes : les cailloux partent à toute vitesse et frappent tellement la chatte sur la face et sur les flancs, sur les portes, sur les courbures, sur les flancs entaillés, [8210] que de toutes parts en volent les éclats, et que des conducteurs plusieurs sont renversés à terre. Par toute la ville on s’écrie à la fois : « Par dieu, dame chatte, traîtresse, vous ne prendrez plus de rats ! » Le comte de Montfort, plein de colère et de dépit, [8215] s’écrie : « Dieu, pourquoi me haïssez-vous ? » Puis il dit aux siens : « Seigneurs chevaliers, voyez quelle male chance, et comme je suis ensorcelé ! l’Église, la science des lettrés ne me servent de rien ; l’évêque ni le légat ne me procurent aucun avantage ; [8220] ma valeur, ma prouesse, sont vaines ; les armes, l’intelligence, les largesses, tout cela ne m’empêche pas d’être refoulé par le bois ou la pierre. J’espérais avoir assez de bonheur pour prendre la cité à l’aide de cette chatte ; [8225] maintenant je ne sais plus que dire ni que faire. — Sire comte, » dit Foucaut, « tâchez de vous retourner d’un autre côté, parce que cette