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Page:La Fontaine - Œuvres complètes - Tome 2.djvu/323

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QUATRIESME PARTIE.

Est-ce affaire ? est-ce maladie ?
Qu’il y revienne de sa vie,
Disoit l’autre ; il aura son tour.
Tandis qu’elles cherchoient là dessous du mystere,
Passe un Mazet portant à la dépositaire
Certain fardeau peu necessaire :
Ce n’estoit qu’un prétexte ; et, selon qu’on m’a dit,
Cette dépositaire, ayant grand appetit,
Faisoit sa portion des talens de ce Rustre,
Tenu, dans tels repas, pour un traiteur illustre.
Le coquin, lourd d’ailleurs, et de trés court esprit,
A la cellule se méprit ;
Il alla chez les attendantes
Fraper avec ses mains pesantes,
On ouvre, on est surpris, on le maudit d’abord,
Puis on void que c’est un tresor.
Les Nonains s’éclatent de rire.
Toutes deux commencent à dire,
Comme si toutes deux s’étoient donné le mot :
Servons nous de ce maistre sot ;
Il vaut bien l’autre ; que t’en semble ?
La Professe ajoûta : C’est trés bien avisé.
Qu’atendions-nous ici ? Qu’il nous fût debité
De beaux discours ? Non, non, ny rien qui leur ressemble.
Ce pitaut doit valoir, pour le poinct souhaité,
Bachelier et Docteur ensemble.
Elle en jugeoit trés-bien : la taille du garçon,
Sa simplicité, sa façon,
Et le peu d’interest qu’en tout il sembloit prendre,
Faisoient de luy beaucoup attendre.
C’estoit l’homme d’Esope ; il ne songeoit à rien ;
Mais il buvoit et mangeoit bien ;
Et, si Xantus l’eust laissé faire,
Il auroit poussé loin l’affaire.
Ainsi, bientost apprivoisé,
Il se trouva tout-disposé
Pour executer sans remise
Les ordres des Nonains, les servant à leur guise