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Page:La Fontaine - Fables, Bernardin-Bechet, 1874.djvu/432

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Mon but est seulement de dire, à ma manière,
Comment l’aveugle que voici
(C’est un dieu), comment, dis-je, il perdit la lumière,
Quelle suite eut ce mal, qui peut-être est un bien.
J’en fais juge un amant, et ne décide rien.

La Folie et l’Amour jouaient un jour ensemble,
Celui-ci n’était pas encore privé des yeux.
Une dispute vint : l’Amour veut qu’on assemble
Là-dessus le conseil des dieux ;
L’autre n’eut pas la patience ;
Elle lui donne un coup si furieux,
Qu’il en perd la clarté des cieux.
Vénus en demande vengeance.
Femme et mère, il suffit pour juger de ses cris :
Les dieux en furent étourdis,
Et Jupiter, et Némésis,
Et les juges d’enfer, enfin toute la bande,
Elle représenta l’énormité du cas ;
Son fils, sans un bâton, ne pouvait faire un pas :
Nulle peine n’était pour ce crime assez grande :
Le dommage devait être aussi réparé.
Quand on eut bien considéré
L’intérêt du public, celui de la partie,
Le résultat enfin de la suprême cour
Fut de condamner la Folie
À servir de guide à l’Amour.


XV

LE CORBEAU, LA GAZELLE, LA TORTUE ET LE RAT

À MADAME DE LA SABLIÈRE

Je vous gardais un temple dans mes vers :
Il n’eût fini qu’avecque l’univers.