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Page:La Fouchardière–Celval — Le Bouif Errant.djvu/182

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— C’est une femme de grande imagination. Si elle était ici avec nous, elle aurait déjà trouvé le moyen de nous faire expulser de l’immeuble.

— Il n’est pas besoin d’Ugénie pour prendre la clef des champs. Mais, dites-moi, étiez-vous vraiment le Roi de Carinthie ?

— Je le suis toujours, grogna Bicard.

— N’exagérez rien, fit le vieux. Le cachot de la Mort lente rend bien rarement ses pensionnaires. Vous êtes dans la même situation qu’un homme enterré vivant, au fond d’un caveau funéraire. De profundis !… Personne ne peut vous découvrir. Le Roi de Carinthie est mort. Vive le suivant !… Plus tard, peut-être, en trouvant votre squelette… on dira…

— Mon esquelette ?

— Dame, fit aimablement le prisonnier. C’est généralement le seul souvenir que les plus grands hommes de l’Histoire laissent à la postérité, Sire.

Le Bouif ne répondit rien. Il était tombé assis sur son escabeau. La tête dans ses mains, il songeait à l’horrible fin prédite.

— Du découragement ? fit le vieux. Je vous croyais plus d’énergie, Monsieur Bicard.

Le Bouif était tellement abattu qu’il ne remarqua point ce que le vieux prisonnier venait de dire.

— Je suis frit, murmurait-il. Je suis nettoyé.

L’abbé Farina se mit à rire.

— J’ai beaucoup de sympathie pour vous… Votre situation n’est pas brillante, mais elle n’est pas désespérée. Attendez-moi.

Il disparut dans sa prison. Bicard l’entendit remuer les pierres de taille. Tous les murs de cette