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Page:La Fouchardière–Celval — Le Bouif Errant.djvu/20

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Le Bouif errant

faites pas pour moi, madame Soupir : une gosse de Montmartre surnage toujours. Allons, au revoir pour de bon. Portez-vous bien, madame Soupir.

Le taxi démarra et descendit rapidement la rue Lepic. La silhouette de la petite blonde, au nez de gavroche et aux cheveux courts, qui venait de lâcher ce flux de paroles, s’évanouit progressivement et ne fut bientôt plus qu’un souvenir.

La concierge était demeurée sur le trottoir.

C’était une personne corpulente et réfléchie, qui accompagnait ses moindres gestes de gémissements et de plaintes. Elle exhalait des lamentations à tout propos et s’apitoyait perpétuellement, comme poussée par un pessimisme involontaire. On l’avait surnommée : Madame Soupir.

— Ah ! jeunesse ! fit-elle, en regardant le taxi disparaître au coin du boulevard.

Elle rentra avec mélancolie dans le corridor obscur de la maison et remonta les cinq étages sur la cour afin de fermer les persiennes de l’appartement de mademoiselle Cécile Coqueluche, dactylographe à ses moments perdus, qui venait de partir pour la patrie du cinéma.

L’appartement de Mlle Coqueluche se composait d’une chambre-salon, meublée d’une grande armoire à glace, d’un paravent, d’un lit immense et d’une machine à écrire, et d’une cuisine, dont le fourneau avait été remplacé par une baignoire.

Il y avait dans les deux pièces un grand désordre. Le départ de la propriétaire avait motivé, sans doute, une perquisition rapide dans les tiroirs des meubles, qui étaient demeurés ouverts. Le lit était défait. Un tas de petites boîtes et de flacons vides