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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/291

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Le clergé est si nombreux, qu’il paraît surprenant que tant de riches ecclésiastiques puissent être entretenus dans ce degré d’opulence par le travail d’un si petit nombre d’habitans. Pour diminuer l’étonnement, les Portugais répondent qu’on n’admet personne au sacerdoce, s’il ne jouit déjà de quelque bien qui l’empêche d’être à charge à l’Église.

Les églises sont les lieux où l’on ensevelit les morts. On orne avec beaucoup de soin le cadavre ; mais on l’enterre sans cercueil, et l’on ne manque pas de mêler de la chaux avec la terre, pour le consumer promptement ; de sorte qu’en moins de quinze jours sa place peut être remplie par un autre corps ; précaution qui semble diminuer le danger de cette absurde coutume de changer les temples en cimetières. Comme l’église romaine a décidé sur le sort des hérétiques, elle ne traite pas leurs cadavres avec beaucoup de ménagement. Les Anglais qui meurent à Madère sont moins considérés que les carcasses mêmes des bêtes ; car on leur refuse toute sorte de sépulture, et leur partage est d’être précipités dans la mer. Ovington rapporte un exemple de cet usage, qu’il traite de barbarie, à l’égard d’un marchand anglais qui mourut sous ses yeux. Tous les marchands de la même nation, voulant l’enterrer avec décence, et le sauver du moins de la rigueur du clergé, prirent le parti de le transporter entre les rochers, dans l’espérance qu’il y serait à couvert des recherches ecclésiastiques : mais ils furent