Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/374

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

esprits y sont trop aigris contre vous. À l’égard de votre charge d’amiral, mon intention n’a jamais été de vous en ôter la possession ni l’exercice : laissez faire le reste au temps, et fiez-vous à moi. »

Colomb comprit par ce discours plus que la reine n’avait eu dessein de lui faire entendre ; il jugea que son rétablissement aurait blessé les règles de la politique espagnole, que le roi était vraisemblablement sa partie en secret ; en un mot, qu’on se repentait de l’avoir tant élevé, et qu’il ne devait pas se flatter de faire changer la cour en sa faveur : aussi, sans s’arrêter à d’inutiles instances, après avoir remercié la reine de sa bonté, il la supplia d’agréer qu’il ne demeurât pas inutile à son service, et qu’il continuât la découverte du Nouveau-Monde, pour chercher par cette voie quelque passage qui pût conduire les vaisseaux de l’Espagne aux Moluques : ces îles étaient alors extrêmement célèbres par le trafic que les Portugais y faisaient des épiceries, et les Espagnols souhaitaient ardemment de partager avec eux un commerce si lucratif. Le projet de l’amiral fut approuvé avec de grands éloges ; la reine lui promit de faire équiper autant de vaisseaux qu’il en demanderait, et l’assura que, si la mort le surprenait dans le cours de cette expédition, son fils aîné serait rétabli dans toutes ses charges.

Rien ne servit tant à justifier l’amiral dans l’esprit de ceux qui jugeaient de lui sans pas-