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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/398

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ordres qu’il lui avait donnés portaient de ne point approcher des vaisseaux de l’amiral ; de ne pas descendre au rivage ; de n’avoir aucun entretien avec les Colomb ni avec ceux qui les accompagnaient ; de ne donner aucune autre lettre que la sienne, et de n’en pas recevoir d’autre que la réponse de l’amiral, afin de faire concevoir qu’il n’était envoyé que pour reconnaître l’état de l’escadre.

Escobar exécuta tous ces points avec une brutale exactitude. Après avoir mouillé à quelque distance des vaisseaux échoués, il alla seul à terre dans un canot ; il fit débarquer un baril de vin et un porc ; il fit appeler l’amiral pour lui remettre la lettre d’Ovando ; et, s’étant un peu éloigné, il lui dit, en élevant la voix, que le gouverneur général était bien fâché de ses malheurs, mais qu’il ne pouvait encore le tirer de la situation où il se trouvait, quoiqu’il fût dans le dessein d’y apporter toute la diligence possible ; et qu’en attendant, il le priait d’agréer cette légère marque de son amitié. En achevant ces mots, il se retira pour aller attendre que l’amiral eût écrit sa réponse, et il la prit ensuite avec les mêmes précautions.

On regarda comme une insulte pour Christophe Colomb le choix d’un envoyé de ce caractère, qui d’ailleurs, suivant les ordres de la cour, ne devait plus être en Amérique, et la modicité du présent ne fut pas moins blâmée pour un homme de ce genre, dont on pouvait juger que la situation n’était pas abondante.