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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/279

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ration pour Pizarre, qui le pria de lui en laisser quelques-uns. Il se mit à l’un des bouts du navire ; puis ayant tracé une ligne, il mit à l’autre bout le capitaine Pizarre avec ses soldats, et ordonna que ceux qui voudraient aller à Panama passassent de son côté. Il ne resta près de Pizarre que treize Espagnols et un mulâtre, qui s’offrirent de mourir pour lui, et de le suivre en quelque lieu qu’il voulût aller. Ils se flattèrent du moins de retenir un des vaisseaux que Tafur avait amenés ; mais toutes leurs prières et celles de Pizarre ne purent fléchir cet officier, qui craignait de déplaire au gouverneur. Il leur promit seulement, pour les consoler, qu’Almagro, dont il connaissait les dispositions, leur en enverrait un de Panama. Cette espérance détermina Pizarre à l’aller attendre dans une île qu’il avait nommée la Gorgone, où il était sûr de trouver de l’eau, et de pouvoir subsister avec le peu de maïs qui lui restait. Le mauvais état de son bâtiment ne l’empêcha point d’embarquer quelques Américains des deux sexes qu’il avait pris sur la côte de Tumbez. En quittant Tafur, il lui confia deux lettres, l’une pour le gouverneur, auquel il reprochait de lui avoir enlevé ses gens, et de rendre un fort mauvais office à l’Espagne par les obstacles qu’il mettait à son entreprise ; l’autre, pour Almagro et Fernand de Luques, qu’il pressait instamment de le secourir.

L’île de Gorgone, que ceux qui l’ont vue comparent à l’enfer, est effrayante par la noire