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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 16.djvu/290

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comme en hiver, il se rassemble une humeur aqueuse qui ne déborde jamais ; et ce qui est beaucoup plus surprenant, qui ne diminue pas non plus, quelque quantité qu’on en puisse tirer. Ainsi chaque branche est comme une source inépuisable ; et l’arbre étant si grand, qu’il peut contenir jusqu’à cinq cents hommes dans la circonférence de ses branches, c’est une retraite admirable, où l’on ne manque jamais d’eau pour boire et pour se laver.

Le brésillet, arbre duquel le pays a tiré son nom, porte celui d’araboutan. Il est de la hauteur de nos chênes, et ne jette pas moins de branches. On en trouve de si gros, que trois hommes auraient peine à les embrasser. Les feuilles ressemblent à celles du buis. Le bois en est rouge, et naturellement si sec, qu’en brûlant il jette fort peu de fumée. Sa vertu est si forte pour la teinture, que, suivant l’expérience de Léry, ses cendres mêmes, mêlées dans une lessive, donnent au linge une couleur qu’il ne perd jamais.

Léry ajoute quelques propos d’un Brasilien qui peignent merveilleusement le sens naturel de ces barbares. « Fort ébahis, dit-il, de voir les Français et autres des pays lointains prendre tant de peine d’aller quérir leur araboutan, il y eut une fois un de leurs vieillards qui me fit cette demande : « Que veut dire que vous autres Maïrs et Péros (c’est-à-dire, Français et Portugais) venez de si loin querir du bois pour vous chauffer ? N’y en a t-il point en