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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/337

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mandement, si le chef et son lieutenant meurent pendant la guerre.

Supposons le corps de troupes embarqué ; les canots s’éloignent d’abord un peu, et se tiennent fort serrés sur une même ligne ; alors le chef se lève, et, un chickikoué à la main, il entonne sa chanson, et ses soldats lui répondent en criant trois fois : He, d’un ton lugubre, et tiré avec effort du creux de la poitrine. Les anciens et les chefs du conseil, qui sont restés sur la rive, exhortent les guerriers au devoir, et surtout à se garantir de la surprise ; avis le plus nécessaire aux sauvages, et celui dont ils profitent le moins. Cette exhortation n’interrompt point le chef, qui chante toujours. Enfin les guerriers conjurent leurs parens et leurs amis de ne pas les oublier ; ensuite, poussant ensemble d’affreux hurlemens, ils partent avec une vitesse qui les fait bientôt disparaître. Les Hurons et les Iroquois n’ont pas l’usage du chickikoué dans leurs guerres ; mais ils en donnent à leurs prisonniers ; et cet instrument, qui est pour les autres un aiguillon de valeur, semble n’être parmi eux qu’une marque d’esclavage.

Les guerriers ne font ordinairement que de petites journées, surtout lorsqu’une troupe est nombreuse. D’ailleurs ils tirent des présages de tout ce qu’ils rencontrent en chemin ; et les jongleurs, dont l’office est de les expliquer, avancent et retardent leur marche à leur gré. Aussi long-temps qu’on ne se croit point dans