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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/402

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pas difficile de les tuer. La même scène recommence le lendemain à quelque distance, et se renouvelle chaque jour pendant toute la chasse. Dès qu’un ours est tué, le chasseur lui met entre les dents le tuyau de sa pipe, souffle dans le fourneau, et, lui remplissant ainsi de fumée la gueule et le gosier, il conjure l’esprit de cet animal de ne pas s’offenser de sa mort ; mais comme l’esprit ne fait aucune réponse, le chasseur, pour savoir si sa prière est exaucée, coupe le filet qui est sous la langue de l’ours, et le garde jusqu’à la fin de la chasse. Alors on fait un grand feu dans la bourgade, et toute la troupe y jette ces filets avec grande cérémonie. S’ils y pétillent et se retirent, comme il doit naturellement arriver, c’est une marque certaine que les esprits des ours sont apaisés. Autrement on se persuade qu’ils sont irrités, et que la chasse ne sera point heureuse l’année d’après, si l’on ne prend soin de se les réconcilier par des présens et des invocations.

Quoique le principal objet de cette chasse soit la peau de l’ours, non-seulement les sauvages se nourrissent de leur chair pendant l’expédition, mais ils en rapportent assez pour traiter leurs amis et pour nourrir long-temps leurs familles. Les missionnaires ne vantent pas beaucoup cet aliment. Dans la belle saison, les ours, qu’on ne tue alors qu’au sommet des arbres, où ils grimpent pour manger le raisin et les fruits, s’engraissent et deviennent de fort bon goût ; cependant ils sont toujours