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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/91

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qu’il l’aimait plus que les autres ; qu’en ouvrant la tête pour manger la cervelle, il s’était senti touché, et qu’il n’avait pas eu la force de lui casser les os pour en sucer la moelle. » On pourrait trouver ce récit peu vraisemblable sur le témoignage d’un seul voyageur, mais il est confirmé par les relations anglaises des mêmes contrées. On y lit, comme dans celle du commandant français, que ces Américains vivent fort long-temps malgré leur misère ; que, si l’âge les met hors d’état de travailler, ils font un festin auquel ils invitent toute leur famille ; qu’après une longue harangue dans laquelle ils recommandent l’union, ils présentent à celui de leurs enfans qu’ils aiment mieux, une corde qu’ils se passent eux-mêmes au cou, et le prient de les étrangler pour les délivrer d’une vie qui fait leur tourment et celui des autres. Tout le monde applaudit à leur résolution, et le fils s’empresse de leur obéir. On aura occasion, dans un autre article, de rappeler leurs usages.

Jérémie reçut ordre, en 1714, de remettre aux Anglais le fort Bourbon, et tout ce que la France avait possédé jusqu’alors dans la baie d’Hudson. Louis xiv s’était déterminé à leur céder sans retour, par l’article 12 du traité d’Utrecht, cette partie de ses domaines, avec l’Acadie et l’île de Terre-Neuve. Ce fut un sacrifice considérable qu’il fit à la paix. Jérémie assure qu’avec un peu de dépense, la baie d’Hudson pouvait devenir le meilleur poste de l’Amérique française, et que le seul fort Bourbon,