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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 2.djvu/25

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commence à paraître, ils s’avancent vers lui sans quitter le sable et sans lever la tête. Ils lui expliquent leur demande, tandis que, feignant de ne les pas voir, ou du moins affectant de ne les pas regarder, il ne cesse pas de s’entretenir avec d’autres personnes. À la fin de leurs discours, il tourne la tête vers eux, et, les honorant d’un simple coup d’œil, il leur fait sa réponse en deux mots. Cadamosto, qui fut témoin plusieurs fois de cette scène, s’imagine que Dieu n’aurait pas plus de respects à prétendre, s’il daignait se montrer à la race humaine. Quand on voit le chef de quelques peuplades nègres écraser ainsi de sa morgue ridicule ses sujets aussi misérables que lui, ceux qui, chez les nations policées, sont élevés par leur rang au-dessus des autres hommes, doivent sentir aiséiment que l’orgueil n’est pas la mesure de la vraie grandeur.

La complaisance de Boudomel alla si loin pour Cadamosto, qu’il le conduisit dans sa mosquée à l’heure de la prière. Les Azanaghis ou les Arabes, qui étaient ses prêtres, avaient reçu ordre de s’y assembler. En entrant dans le temple, avec quelques-uns de ses principaux Nègres, Boudomel s’arrêta d’abord, et tint quelque temps les yeux levés au ciel. Ensuite, ayant fait quelques pas, il prononça doucement quelques paroles, après quoi, il s’étendit tout de son long sur la terre, qu’il baisa respectueusement. Les Azanaghis et son cortège se prosternèrent et baisèrent la terre à son exemple. Il se leva,