Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 26.djvu/128

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chose ; mais il fit une réponse différente et plus convenable, en disant qu’un marin ne savait pas où il serait enterré. Toutes les grandes familles de ces îles ont coutume d’avoir des cimetières particuliers qui passent, avec leurs biens, à leurs héritiers. Le moraï d’O-parri, à Taïti, pendant le règne de Toutaha, était appelé moraï no Toutaha ; mais on le nomme aujourd’hui moraï no O-tou, comme on l’a déjà remarqué. Quelle plus grande preuve d’amitié ces insulaires pouvaient-ils nous donner que de vouloir se souvenir de nous lors même que nous ne serions plus ? Nous leur avions répété souvent que nous les voyions pour la dernière fois : ils voulurent savoir dans quel endroit nos cendres iraient se joindre à celles de nos ancêtres.

» Comme je ne pouvais ni promettre ni espérer qu’on enverrait de nouveaux vaisseaux visiter ces îles, Oedidi, notre fidèle compagnon, se décida à rester dans sa patrie ; mais il nous quitta avec des regrets qui montraient bien son estime pour nous : rien ne put l’y déterminer que la crainte de ne jamais revoir son pays. Quand le chef me pressait avec tant d’instance de revenir, je lui fis quelquefois des réponses qui lui laissaient un peu d’espérance. Oedidi, à l’instant, me tirait de côté, et se faisait répéter ce que je venais de dire. Lorsqu’il fallut nous séparer, il courut de chambre en chambre pour embrasser tout le monde.

» Je ne puis pas décrire les angoisses qui