Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 4.djvu/374

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

blemens et des douleurs incroyables, sans qu’on ait pu trouver jusqu’à présent de remède à la force d’un poison si puissant. Chaque insulaire a quantité de ces redoutables traits. Les pierres sont une autre partie de leurs munitions. Ils les lancent avec tant d’adresse et de raideur, qu’elles entrent quelquefois dans le tronc des arbres. On ne leur connaît point d’armes défensives. Ils ne parent les coups qu’on leur porte que par la souplesse et l’agilité de leurs mouvemens. Mais s’ils sont mauvais guerriers, ils entendent si bien la dissimulation, que les étrangers y ont été toujours trompés avant d’avoir appris à les connaître.

La vengeance est une de leurs plus ardentes passions. S’ils reçoivent une injure, leur ressentiment n’éclate jamais par des paroles : toute leur aigreur et leur amertume se renferment dans leur cœur. Ils sont si maîtres d’eux-mêmes, qu’ils laissent passer tranquillement des années entières pour attendre l’occasion de se satisfaire : alors ils se dédommagent d’une si longue violence, en se livrant à tout ce que la haine et la trahison leur inspirent de plus noir et de plus affreux.

Leur inconstance et leur légèreté sont sans exemple. Comme ils vivent sans contrainte et dans l’habitude continuelle de suivre tous leurs caprices, ils passent aisément d’une inclination à l’autre ; ce qu’ils désirent avec le plus d’ardeur, ils cessent de le vouloir le moment