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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/238

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vée douce. Ce bonheur nous fit oublier toutes nos peines. Nous abordâmes au côté droit de la rivière, où le rivage était couvert de belles herbes, entre lesquelles nous découvrîmes de petites fèves telles qu’on en voit dans quelques endroits de la Hollande. Notre première occupation fut d’en manger avidement. Quelques-uns de nos gens, étant allés au-delà d’une pointe de terre qui se présentait devant nous, y trouvèrent du tabac et du feu ; nouveau sujet d’une extrême joie. Quelque explication qu’il fallût donner à ces deux signes, ils nous marquaient que nous n’étions pas loin de ceux qui les avaient laissés. Nous avions dans la chaloupe deux haches qui nous servirent pour abattre quelques arbres, dont nous fîmes de grands feux en plusieurs endroits ; et nos gens, divisés en petites troupes, s’assirent autour, et se mirent à fumer le tabac qu’ils avaient trouvé.

» Vers le soir, nous redoublâmes nos feux ; et, dans la crainte de quelque surprise, je posai trois sentinelles aux avenues de notre petit camp. La lune était au déclin. Nous passâmes la première partie de la nuit sans autre mal que de violentes tranchées qui nous venaient d’avoir mangé trop de fèves ; mais, au milieu de nos douleurs, les sentinelles nous apprirent que les habitans du pays s’approchaient en grand nombre. Leur dessein, dans les ténèbres, ne pouvait être que de nous attaquer. Toutes nos armes consistaient dans les deux haches,