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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/65

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qui furent jetés à fond de cale, pieds et poings liés, dans le dessein d’en tirer diverses lumières par la force des tourmens. Mais ils se rendirent entre eux le service de s’égorger à belles dents. Le nombre de nos morts ne monta qu’à cinquante-deux, dont huit étaient de notre nation.

» Après avoir employé une partie du jour à leur rendre les honneurs de la sépulture, Faria fit le tour de l’île pour y chercher ce qui pouvait avoir appartenu au corsaire. Il découvrit dans une vallée fort agréable un village d’environ quarante maisons ; et plus loin, sur le bord d’un ruisseau, une pagode où Goja-Acem avait mis ses malades. C’était dans le même lieu que ceux qui avaient échappé aux flots avaient pris le parti de se retirer. À la vue de Faria, qu’ils aperçurent de loin, ils députèrent quelques-uns d’entre eux pour implorer sa miséricorde ; mais, fermant l’oreille à leurs prières, il répondit qu’il ne pouvait faire grâce à ceux qui avaient massacré tant de chrétiens : ces misérables étaient au nombre de quatre-vingt-seize. Nous mîmes le feu à six ou sept endroits de la pagode, qui, n’étant composée que de bois sec et couverte de feuilles de palmier, fut bientôt réduite en cendres. Les corsaires, attaqués par les flammes et la fumée, jetèrent des cris pitoyables, et quelques-uns se précipitèrent du haut des fenêtres ; mais ils furent reçus sur les pointes de nos piques et de nos dards, et nous eûmes la satisfaction de rassasier notre vengeance.