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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 5.djvu/98

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nous désespérâmes d’un meilleur sort. Nous prîmes le parti de retourner à l’est en suivant le bord de l’eau, sur lequel nous passâmes une nuit fort obscure, aussi tourmentés par la faim que par le froid et la pluie. Le lendemain avant le jour, nous aperçûmes un grand feu vers lequel nous nous remîmes à marcher ; mais, le perdant de vue au lever du soleil, nous continuâmes jusqu’au soir de suivre la rivière. Le pays commençait à s’ouvrir. Notre espérance était de rencontrer quelque habitant sur la rive : d’ailleurs nous ne pouvions nous éloigner d’une route où l’eau, qui était excellente, servait du moins à soutenir nos forces. Le soir nous arrivâmes dans un bois, où nous trouvâmes cinq hommes qui travaillaient à faire du charbon.

» Un long commerce avec leur nation nous avait rendu leur langue assez familière. Nous nous approchâmes d’eux, nous nous jetâmes à leurs pieds pour diminuer l’effroi qu’ils avaient pu ressentir à la vue de onze étrangers. Nous les priâmes au nom du ciel, dont la puissance est respectée de tous les peuples du monde, de nous adresser dans quelque lieu où nous pussions trouver du remède au plus pressant de nos maux. Ils nous regardèrent d’un œil de pitié. « Si votre unique mal était la faim, nous dit l’un d’entre eux, il nous serait aisé d’y remédier ; mais vous avez tant de plaies, que tous nos sacs ne suffiraient pas pour les couvrir. » En effet, les ronces, au travers