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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/268

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un temps où la crue extraordinaire des eaux ne leur permettait pas d’y jeter des ponts. On n’a pas douté que, si les Afghans, peuples qui habitent à l’occident de l’Indus, avaient exécuté la résolution qu’ils formèrent d’attaquer au passage une armée chargée de butin, Nadir-Schah n’eût été perdu sans ressource : mais son argent le tira de ce danger ; dix laks de roupies qu’il distribua aux chefs de la ligue firent évanouir tous leurs projets ; les eaux diminuèrent ; on jeta un pont sur le fleuve, et l’armée passa sans obstacle. Alors il prit une résolution qu’Otter met au rang des plus grandes actions de sa vie, et qu’il ne put croire, dit-il, qu’après se l’être fait attester par plusieurs témoins dignes de foi : il fit publier parmi ses troupes un ordre de porter dans son trésor tout le butin qu’elles avaient fait dans l’Inde, sous prétexte de les soulager en se chargeant de ce qui pouvait les embarrasser dans leur marche. Elles obéirent ; mais il poussa l’avidité plus loin : on lui avait appris que les officiers et les soldats avaient caché des pierreries ; il les fit fouiller tour à tour en partant, et leur bagage fut visité avec la même rigueur. Mais, après s’être emparé de tout ce qu’on découvrit, il fit distribuer à chaque soldat cinq cents roupies, et quelque chose de plus aux officiers, pour les consoler de cette perte. Il doit paraître étonnant que toute l’armée ne se soit pas soulevée contre lui plutôt que de se laisser arracher le fruit d’une