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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 6.djvu/335

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leur avait épargné la peine de conduire à Delhy leur misérable présent, et qui leur fournissait un prétexte pour implorer la générosité d’autrui. En effet, le gouverneur de Surate les nourrit quelque temps, et leur fournit de l’argent et des voitures pour continuer leur voyage. Adrican, chef du comptoir hollandais, leur donna pour Bernier une lettre de recommandation que Murat lui remit, sans savoir qu’il fût son ancienne connaissance de Moka. Ils se reconnurent, ils s’embrassèrent, et Bernier lui promit de le servir à la cour ; mais cette entreprise était difficile. Comme il ne leur restait du présent qu’ils avaient apporté que leur peau de mule et la corne de bœuf, et qu’on les voyait dans les rues sans palekis et sans chevaux, avec une suite de sept ou huit esclaves nus, ou qui n’avaient pour tout habillement qu’une mauvaise écharpe bridée entre les cuisses, et un demi-linceul sur l’épaule gauche, passé sous l’aisselle droite en forme de manteau d’été, on ne les prenait que pour de misérables vagabonds qu’on n’honorait pas d’un regard. Cependant Bernier représenta si souvent la grandeur de leur maître à Danech-Mend, ministre des affaires étrangères, que ce seigneur leur fit obtenir une audience d’Aureng-Zeb. On leur donna, suivant l’usage, une veste de brocart avec une écharpe de soie brodée, et le turban. On pourvut à leur subsistance ; et l’empereur, les dépêchant bientôt avec plus d’honneurs